Réforme de la valeur locative : quels impacts sur la planification patrimoniale ?
Dans cet épisode spécial du podcast Resolve, Pablo Astengo, Head of Pension Solutions & Wealth Planning dans la banque Syz, décrypte les effets concrets de la réforme de la valeur locative, à travers le prisme de la gestion patrimoniale, de l’accès à la propriété et de la transmission successorale. Un regard expert et nuancé sur une réforme aux conséquences profondes, bien au-delà de la seule question fiscale.
Une réforme qui change les règles du jeu
La votation du 28 septembre vise à supprimer la valeur locative pour les résidences principales. Si la mesure peut sembler technique, ses effets seront profonds : la fin des déductions fiscales pour les intérêts hypothécaires et les frais d’entretien modifiera les stratégies patrimoniales classiques des propriétaires.
Dans le conseil patrimonial, ces leviers fiscaux sont aujourd’hui utilisés pour optimiser l'entretien, la valorisation du bien et la structuration de la dette. Leur disparition obligera à repenser ces équilibres.
Des impacts différés… mais profonds
Pour les jeunes acquéreurs, les effets ne se feront pas sentir immédiatement. Mais dans 20 ou 30 ans, lorsqu’il sera nécessaire de rénover ou d’entretenir leur bien, l’absence d’incitation fiscale pourrait les freiner. Sans travaux réguliers, les logements perdront en valeur, et la capacité à les transmettre ou à les refinancer diminuera.
La réforme pourrait aussi décourager l’achat de biens à rénover, souvent prisés par les jeunes ménages, car l’absence d’effet fiscal rendrait ces projets moins attractifs.
Transmission patrimoniale et stratégie successorale
En l’absence de levier fiscal, les familles pourraient être incitées à amortir plus rapidement leurs dettes hypothécaires. Cela facilitera peut-être les transmissions à terme, mais réduira la capacité d’optimisation via le pilier 3a ou d’autres véhicules.
Certaines stratégies devront être revues, en particulier chez les ménages ayant un patrimoine concentré dans l’immobilier résidentiel.
Un possible pic, puis un ralentissement
À court terme, la réforme pourrait provoquer un afflux de travaux de rénovation, les propriétaires cherchant à profiter une dernière fois des déductions. Mais à long terme, l’effet risque de s’inverser. La baisse de l’incitation fiscale pourrait ralentir l’entretien du parc immobilier, avec des effets macroéconomiques sur les secteurs de la construction et de l’artisanat.
Vers une évolution des financements et des portefeuilles
Ce changement pourrait aussi réorienter l’allocation du capital. Certains investisseurs pourraient privilégier d'autres formes d'actifs ou des solutions de financement alternatives, comme le private debt immobilier, plus souples que les hypothèques traditionnelles. Les banques devront peut-être adapter leur modèle, notamment face à une baisse des liquidités mobilisées pour l’immobilier.
Une réforme qui touche la majorité silencieuse
Contrairement à ce que laisse penser le titre officiel de la votation, cette réforme ne cible pas uniquement les résidences secondaires, mais tous les propriétaires qui habitent leur logement. Elle impactera donc fortement la classe moyenne, soit une large part de la population suisse. Ce sont ces propriétaires qui verront disparaître des avantages fiscaux importants, et dont les capacités d’entretien ou de transmission seront affaiblies.
À retenir
- La réforme affectera directement les stratégies d'entretien, de valorisation et de transmission des biens immobiliers.
- Les jeunes propriétaires risquent de se retrouver démunis dans 20 à 30 ans, au moment de rénover leur logement.
- Le secteur bancaire devra peut-être adapter ses pratiques face à une baisse des liquidités liées à l’immobilier.
- À court terme, un pic de rénovations est à prévoir… mais le ralentissement suivra.
- Ce sont les propriétaires de la classe moyenne qui seront les plus exposés.
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